Un peu d'Histoire




Un peu d'Histoire 

De Jérusalem à Lirey

http://www.suaire-turin.com/dompsureyl.htm

Exposé de Mlle Bénédicte de DOMPSURE
lors de l'Assemblée Générale MNTV du 3 avril 1998.

Mlle de Dompsure préparait à l'époque un DEA avant la rédaction d'une thèse sur le linceul de Turin, sous la direction de M. Bernard DEMOTZ, professeur d'histoire à l'université Jean Moulin de Lyon. Compte tenu du stade d'avancement de ses études, Mlle de Dompsure s'est attachée à vérifier ce qui a été dit des différentes étapes du voyage du linceul, en même temps que les documents ayant servi de base d'études, ainsi que les thèses sur lesquelles le Professeur Demotz a travaillé.
En préambule, il convient de distinguer image et relique.
- Les images sont les représentations du visage du Christ apparues miraculeusement ou reproduites d'après un prototype miraculeux.
- Les reliques sont les témoins de la vie du Christ. Les traces de sang et de boue trouvées sur le linceul attestant la présence d'un corps, le linceul est bien une relique.
L'exposé suivant porte sur : 1. Ce que l'on sait sur l'image du suaire depuis Jérusalem jusqu'à Turin. 2. Les trois principales périodes de silence, avec un plus long développement sur la période byzantine, entre le VIIème et le XIIème siècle, et l'image d'Édesse.
I. Les faits connus
On compte six étapes : Jérusalem, Constantinople, Athènes, Lirey en Champagne, la Savoie et Turin.
- Jérusalem
Les premiers documents sont les évangiles. Les apôtres ont trouvé dans le tombeau le linceul et des linges. D'autres traces existent : par exemple, en 340, St Cyrille de Jérusalem fait allusion au linceul, témoin de la Résurrection .
En 540, Justinien Ier envoie à Jérusalem des hommes dignes de foi et d'estime pour mesurer la haute stature de Notre-Seigneur Jésus-Christ (Texte anonyme du XIème siècle : Anonymus Banduri, Patrologie grecque de Migne, T. 122, col. 1305) en vue de la réalisation de la grande croix de Sainte-Sophie. On peut supposer que le linceul a été utilisé à cette fin. D'autre part, Saint Braulion, évêque de Saragosse, dit que les linges sacrés du Sauveur ont échappé aux romains, aux perses dont la dernière attaque date de 614 et aux arabes dont la première attaque se produit en 635. On peut émettre à partir de ce document l'hypothèse d'un transfert du linceul au VIIème siècle, cependant il ne donne aucun renseignement sur le lieu où il aurait été transféré.
- Constantinople
La présence du linceul semble assurée à certaines époques.
Au VIIème siècle, sous le règne de Justinien II, durant la période 685-695, les premières monnaies d'or représentent le buste du Christ et comportent certaines analogies avec le Saint Suaire.
En 692, le concile de Constantinople ordonne de présenter le Christ comme un homme et plus jamais comme l'agneau symbolique. On constate alors que la représentation du Christ pantocrator offre des analogies assez remarquables avec le Suaire : mèches sur le front, triangle au-dessus du nez, pli au niveau de la gorge...
Suit une longue période de silence.
On retrouve le linceul à Notre-Dame du Phare, dans l'église de Constantinople, en 1092. Dans une lettre à Robert de Flandre, Alexis I Commène dit avoir vu à Constantinople les linteamina ("linges de lin", terme usuel pour désigner le linceul) trouvés après la Résurrection dans le sépulcre ( "Linteamina, post resurrectionem eius inuenta in sepulcro" , Migne Patr. lat., T.CLV, col. 466-470).
En 1201, Nicolas Mésaritès, le gardien des reliques de Notre-Dame du Phare, rapporte : Ici, il ressuscite, et le Suaire, avec les linges en sont la manifestation. Ils bravent la corruption car ils ont enveloppé l'ineffable mort (cité par P. Riant dans Exuviae sacrae Constantinopolitanae). Ce témoignage peut confirmer la présence du linceul au début du XIIIème siècle.
Le codex Pray enfin, qui présente beaucoup d'analogies avec le linceul (représentation du tissu en chevrons, marques de brûlures dans la même disposition que sur le Suaire, avec le L à l'envers) montre que le linceul était déjà connu à cette époque.
- Athènes
Dans une lettre adressée au Pape Innocent III, Isaac II Ange réclame la restitution des reliques volées par les français et précise que le linceul est à Athènes. On ne sait pas toutefois jusqu'à quand il y serait resté.
La date de 1311 est avancée pour le transport des reliques par Agnès de Charny à destination de la France, afin de les soustraire aux barbares. Cette hypothèse, formulée par Pingon au XVIème siècle est rendue plausible par les ravages effectués en Grèce à cette époque par la grande compagnie catalane et ses mercenaires musulmans. On peut supposer qu'on a voulu alors soustraire le Suaire au pillage.
- Lirey en Champagne
Le linceul est aux mains de Geoffroi de Charny, fondateur de la collégiale vouée au culte de la relique ainsi que l'indique une médaille conservée au musée de Cluny.
On y voit une représentation du linceul avec ses chevrons et, dessous, les armes de Geoffroi de Charny et de Jeanne de Vergy son épouse, en qualité de donatrice du linceul à la collégiale.
Lors de l'exposition du linceul par la veuve de Geoffroi, tué à la bataille de Poitiers, vers 1357, l'évêque de Troyes interdit cette ostension. Retiré, le linceul est à nouveau exposé en 1389. L'évêque de Troyes s'y oppose pour la seconde fois et affirme, dans une lettre, avoir découvert le peintre auteur de cette image.
En 1418, Humbert de Villersexel, époux de Marguerite de Charny, décide de retirer le linceul à cause des pillages perpétrés lors de la guerre entre Armagnacs et Bourguignons. Les chanoines de la collégiale veulent récupérer la relique et protestent.
A partir de ce moment, le linceul est transporté d'un château à l'autre, mais toujours au sein de la famille de Charny : château de Montfort en 1418, Saint-Hyppolite-sur-le-Doubs jusqu'en 1449.
En 1453, le duc de Savoie obtient la relique de Marguerite de Charny et l'installe en permanence derrière le ma"tre-autel de la Sainte- Chapelle au château de Chambéry.
A la même époque, en 1506, le Pape Jules II autorise l'ostension de l'insigne linceul dans lequel Notre-Seigneur Jésus-Christ fut enveloppé au tombeau. A partir de ce moment, il y a une ostension annuelle.
En 1532, le linceul est sauvé d'un incendie accidentel à Chambéry. Il est restauré deux ans plus tard par les Clarisses qui en établissent un compte-rendu assez détaillé.
En 1536 se produit la première invasion française de la Savoie. Le duc prend la précaution de retirer le linceul de Chambéry et le transporte à Verceil et Nice.
En 1578, le linceul est transféré à Turin, la capitale de la Savoie y ayant été établie. En 1860 il appartient toujours à la famille de Savoie.
En 1898, le roi d'Italie en fait prendre une photographie, à l'origine d'une première vague de recherches après la révélation du négatif. En 1983, le roi Humbert II lègue par testament le linceul au Pape Jean-Paul II qui encourage une seconde vague de recherches.
Voilà donc quelques étapes sur ce que l'on sait de l'itinéraire du linceul.
II. Les périodes de silence
Il y en a trois grandes : la période romaine, la période byzantine et la période latine.
- Période romaine
Après l'indication du début à Jérusalem, on a très peu d'indices. Cela s'explique par l'hostilité des juifs non-convertis : le suaire ne peut représenter Dieu puisqu'il n'est pas admis que le Fils puisse s'incarner, et un linge qui a été au contact d'un mort est un objet impur.
- Période latine
à partir du XIIIème siècle. Le silence observé s'expliquerait par la discrétion à laquelle devait se tenir la famille du fait que les Byzantins réclamaient la relique volée et qu'elle n'avait donc pas intérêt à s'en reconna"tre propriétaire.
- Période byzantine
Cette période peut également s'expliquer. C'est la période de la querelle sur la nature du Christ, les nestoriens insistant sur la nature humaine, et les monophysites sur la nature divine. Les querelles qui s'ensuivent sont si violentes que Justinien est obligé d'intervenir et expliquent que l'on n'ait pas pris le risque d'exposer le suaire en cette fin du Vème siècle.
Ensuite, c'est la période de l'iconoclasme dont les tenants sont opposés à toute image, même celle du linceul. On ne prend donc pas davantage le risque de l'exposer.
Il convient de préciser que les images avaient existé dans l'église dès les premiers siècles, avec une intensification du Vème au VIIème siècle, comme en correspondance avec le souci de remplacer le culte antérieur (les dieux lares).
Dès le VIème siècle les reliques prennent de plus en plus d'importance car les Saints sont non seulement des modèles vénérables mais aussi des intercesseurs auprès de Dieu. Il faut donc être près d'eux, d'où la place importante des reliques dans le culte des Saints, culte dans lequel les iconoclastes voient un certain danger de polythéisme. Ce qui expliquerait encore qu'on n'ait pas exposé le suaire.
L'image d'Édesse permettait de combler un grand vide de quelques siècles, mais des recherches récentes présentent l'image d'Édesse et le linceul comme deux objets différents ainsi qu'il va être précisé plus loin.
Quelques indices de la présence du linceul à Constantinople au VIIème siècle existent.
En 540, lors de la mission envoyée par Justinien Ier, Jérusalem se trouvait en territoire byzantin. Si le linceul y était, il y a de grandes chances pour qu'il ait été transporté à Constantinople à la fin du VIème ou au début du VIIème siècle en même temps que beaucoup d'autres reliques pour le protéger des invasions.
Au début, toutes les reliques étaient à Jérusalem et beaucoup d'entre elles ont été transférées à Constantinople comme l'attestent les inventaires. On peut se demander pourquoi le linceul aurait fait exception en prenant le chemin d'Édesse. Mais il ne s'agit là que d'une hypothèse.
En 626, le patriarche Sergios organise une procession sur les remparts de Constantinople en portant l'image du Christ non-faite de main d'homme, alors que la ville est assiégée par les perses. La ville est préservée, les perses vaincus. De quelle image s'agit-il ? L'état des recherches ne permet pas de le préciser.
On peut citer également le témoignage, plus vague car il n'indique pas de lieu, de saint Braulion, évêque de Saragosse.
Enfin, la monnaie de Justinien II, en présentant des analogies avec l'empreinte du linceul, apporte un élément sérieux en faveur de la présence du linceul à Constantinople.
Il s'agit donc là d'une série d'indications intéressantes qu'il convient de vérifier et d'étayer pour les dépouiller des incertitudes qui les entourent encore.
L'image d'Édesse
A la base, on trouve la légende rapportée par Joseph de Césarée, ensuite par Evagre le scholastique. Il s'agirait du linge sur lequel le Christ aurait imprégné son visage, puis l'aurait donné au messager du roi d'Édesse, Abgar V, malade, et qui, à la vue de ce visage aurait été guéri. La description de cette image a été faite par Grégoire le Référendaire en 944, lors du transfert de l'image à Constantinople : Il a été imprimé par les seules sueurs de l'agonie qui ont découlé du visage du Prince de la Vie, comme des caillots de sang et par le doigt de Dieu. Telles sont, en fait, les parures qui ont coloré l'empreinte du Christ et, depuis qu'elles ont coulé, elles ont été embellies par les gouttes qui ont coulé de son propre côté .
On pourrait donc penser qu'il s'agit du linceul de Turin, car rien ne dit que ce ne l'est pas. à partir de ces éléments, les historiens ont déduit que l'image d'Édesse se confondait avec le linceul. Mais depuis, les recherches ont permis de nouvelles découvertes.
Pour parler de l'image d'Édesse, on utilise les termes de mandylion ou d'image, alors que les témoignages des XIème et XIIème siècles nomment le linceul linteum (toile de lin) ou sydoine (traduction du terme grec sindon ) . Ces mêmes témoignages mettent à part, dans les inventaires, le linceul et l'image d'Édesse. Par exemple, dans la description du sanctuaire de Constantinople datée de 1190, la distinction est nette : Ici, au sanctuaire, dans la chapelle impériale de Constantinople, on trouve en permanence, d'un côté le linge de lin dans lequel le corps du Christ crucifié a été enveloppé nu (on notera que l'évocation d'un corps nu était contraire aux représentations faites jusque là) et, de l'autre côté, le mandylion du roi Abgar qui, par le Seigneur, à travers l'apôtre Thaddée, a été envoyé à Édesse et sur lequel son image (imago) a été représentée ("Hoc est sanctuarium quod in capella imperalii Constantinopolim ad praesens continetur : [...]Item pars linteaminum, quibus crucifixum Christi corpus meruit inuoluere iam dictus Arimatensis Joseph... Item Manutergium, regi Abgar, a Domino, per Thadeum apostolum, Edesse missum, in quo ab ipso Domino sua ipsius transfigurata est ymago". Descriptio sanctuarii Constantinopolitani.Roma, Bibl. Vatican., Reg Christ., 712, F.91 v¡ - paris Bibl. Nat., lat 6186 (Colbert 6322) f.117 v¡).
Dix ans plus tard, un inventaire des reliques est dressé par Antoine, archevêque de Novgorod, lors de son voyage à Constantinople en 1200. D'un côté au Bucholéon, il nomme le linteum, le linge de lin qui représente l'image du Christ, ensuite il nomme à Sainte Marie des Blachernes, de l'autre côté de Constantinople, l'image d'Édesse ("linteum faciem Christi repraesentans" et " imago Salvatoris, quam christianus quidam Theodorus Abrahae Judeo oppignorauerat ", Bulletin de l'Académie Impériale de St-Pétersbourg, Shornik, 1875, T. XII, pp. 340-349). Il y a donc bien, là aussi, deux choses distinctes. A noter également que le linceul représente le corps entier, alors que dans le cas du mandylion seul le visage est mentionné, ce qui correspond bien aux dimensions de ce linge.
Le trou de la période byzantine n'est pas comblé. Les recherches ont donc été axées sur l'iconographie pour tenter de retrouver les représentations du Christ.
On s'aperçoit que la lignée picturale du linceul, où le linceul semblerait être la source des images, apparaît vers 540.
Ensuite, vers 685-695 et 705-711, la monnaie de Justinien II présente des analogies avec le linceul. De même, celle de Michel III, entre 842 et 867.
A la chapelle de Santa Maria Antiqua à Rome, la crucifixion datée de 705-708 a également des similitudes avec le linceul : cheveux en bandeaux, mèche sur le front, joue gauche un peu plus haute, ride entre le nez et la lèvre supérieure. Or on attribue la décoration de cette chapelle au fils d'un curateur byzantin du palais impérial, qui aurait donc pu approcher le linceul.
Au Xème siècle, un renouveau artistique se produit, qui se traduit par la représentation de nombreux visages du Christ selon le linceul, c'est-à-dire conformément aux caractéristiques établies par Paul Vignon et que l'on retrouve de manière troublante, en particulier dans les représentations du Christ pantocrator observées en différents lieux et révélatrices d'une source commune.
En conclusion
Il n'est pas possible de répondre à la question de l'authenticité du linceul tant que la recherche reste incomplète et n'établit pas de continuité.
Cependant, le faux médiéval n'est pas envisageable, car l'état des techniques et des connaissances au Moyen-âge ne permettait pas de réaliser ce que décèlent la médecine moderne et la photographie.
Il en est de même pour la peinture, car un peintre en général ne cherche pas à représenter la réalité dans tous ses détails. Il est toujours sujet à un phénomène d'abstraction. On peut ajouter que les peintres ne peignent pas sur un même support la partie faciale et la partie dorsale.
Le miracle consistant à reproduire sur un tissu le corps du Christ mort sans que son corps y soit déposé est improbable, car les traces de sang et de boue retrouvées sur le linceul prouvent qu'il y a eu la présence d'un corps.
La crucifixion par des fanatiques musulmans est également une hypothèse peu probable, car elle supposerait de la part des turcs la connaissance exceptionnelle des détails de la Passion et des procédés romains de crucifixion qui, pour la plupart n'étaient plus employés au Moyen-Âge. L'hypothèse d'un mystique qui aurait voulu revivre la Passion est à écarter pour les mêmes raisons, les procédés employés par les romains ayant été inventoriés beaucoup plus tard, lors de travaux archéologiques.
Le faux paraît impossible. Le vrai est possible. Mais, d'un point de vue historique, il n'est pas certain. Il faut donc poursuivre les recherches historiques qui pourraient apporter beaucoup à la connaissance du linceul et qui, croisées avec celles d'autres disciplines, pourraient peut-être permettre de conclure sur la question de son authenticité.
III. Remarques et questions des participants
- Le tétradiplon (quatre fois double) qui a l'avantage de réunir mandylion et image d'Édesse, n'apporte-t-il pas une explication valable des faits ? En le pliant une fois, en effet, on efface le dos; une seconde fois, les jambes; une troisième fois, le buste, pour ne laisser appara"tre ensuite que le visage. Le linge ainsi plié, seul le visage était visible, mais le reste du corps n'était-il pas dévoilé le vendredi à Sainte Marie des Blachernes ?
Cette hypothèse ne parait pas pouvoir être retenue tant la référence systématique au seul visage, lorsqu'on parle du mandylion, semble exclure la représentation d'un corps sur le même linge. De plus, dans les témoignages distinguant linceul de Turin et image d'Édesse, le premier est évoqué avec la représentation du corps qui s'y trouve imprimée, la seconde n'en parle pas.
- Dans une miniature du manuscrit de la chronique de Jean Skylitzès concernant l'arrivée du mandylion à Constantinople en 944, l'étoffe portant l'effigie du Christ en relief, comme séparée d'elle, est longue de plusieurs mètres et non réduite aux dimensions d'une serviette. Le linceul d'une part, le mandylion de l'autre auraient-ils été réunis ?
En fait, c'est pour pouvoir montrer la tête sur le linge non déployé dans la largeur qu'on l'a représentée comme émergeant en relief.
Suit une énumération détaillée de données anciennes qui n'ont pas trouvé place dans l'exposé ci-dessus et qui ont fait l'objet de développements complets dans Histoire ancienne du Linceul de Turin du Père A-M Dubarle et d'articles parus sous sa signature dans plusieurs bulletins de MNTV.
Sont cités :
- L'évangile aux Hébreux. Une citation qu'en fait St Jérôme montre que des chrétiens savaient que le linceul existait.
- La légende d'Abgar, qui mériterait quelque développement. - Une hymne liturgique en syriaque faisant état en l'an 600 de l'existence dans la cathédrale d'Édesse de la représentation d'un visage non-de-main .
- Le récit d'Evagre sur l'heureuse issue du siège d'Édesse par les perses. - Le témoignage de Grégoire le référendaire.
- Le récit des envoyés de Saint Louis auprès de Baudouin à Constantinople. Parmi les reliques cédées par ce dernier figure "une sainte toile insérée sur une planche" ou "insérée dans un étui ". L'énumération faite par les envoyés du roi est en correspondance exacte avec celle de la bulle de Baudouin à l'exception de la sanctam toellam qui n'est plus mentionnée.
A sa place on parle d' "une planche que toucha le visage du Seigneur quand on le déposait de la croix" . On a ainsi l'explication de la miniature de Skylitzès. On y voit l'empereur baisant la tête du Christ et un long ruban non déployé, avec l'image cachée, car ce qu'on a apporté d'Édesse n'est pas seulement le linceul mais le linceul dans son étui, sur lequel une miniature faite de main d'homme représentait la tête du Christ. C'est cette miniature de l'étui qui a servi de modèle au mandylion, terme propre à Constantinople et utilisée seulement après son arrivée. C'est par anachronisme qu'on en parle à Édesse où il n'a jamais été. Il était à Constantinople où on a très peu déployé la toile, mais on a fait des représentations de la miniature faite de main d'homme qui était sur l'étui. La collection de ces reliques était conservée à la Sainte Chapelle à Paris; puis Charles V, vers 1370, avait fait faire un petit reliquaire dans lequel on avait placé des fragments minuscules de toutes les reliques qui s'y trouvaient ainsi qu'un dessin qui les représentait et leur liste en exacte concordance avec la bulle de Baudouin.
Ce dessin représente, entre autres, une petite boite vide avec son couvercle ouvert et il n'est plus question de la "tabulam insertam "mais du tablel, mot dérivé de tabula.
On a ainsi l'indication de ce qui restait à la Sainte Chapelle à cette époque. La "sancta toella" remise par Baudouin à Saint Louis n'y figurait plus.
Parmi les autres questions posées par les participants figurent :
- L'importance de l'iconographie où les recherches sont à poursuivre pour savoir si les traits caractéristiques relevés de manière générale à partir du VIème siècle sur les représentations du visage du Christ se retrouvent sur d'autres personnes (St Pierre, St Paul...).
- Les recherches sur la crucifixion romaine dont on connaît beaucoup de modes d'exécution.
- L'existence d'enquête sur la possibilité de faire des faux à l'époque médiévale sur de grandes toiles, avant les XVème - XVIème siècles. De grandes toiles peintes ont existé aux XIVème - XVème siècles. Elles étaient utilisées pour la catéchèse lors des cérémonies commémorant la Passion. Elles décoraient les églises ou étaient placées sur les parvis en France, en Allemagne, en Suisse, et l'on prêchait devant.
- L'intérêt des recherches de documents sur les suaires de Compiègne et d'Aix dont l'existence est mentionnée pendant des périodes de silence du linceul et qui ont donné lieu à des ostensions.
- L'existence d'une représentation sur tissu en deux teintes distinctes, l'une du genre impression sur le linceul, l'autre plus colorée, de la partie faciale et de la partie dorsale complètes d'un être humain et sur un même document, avec une trace du coeur à droite. Dans l'affirmative, il serait intéressant de connaitre le motif qui a pu guider l'auteur. Dans le cas d'une représentation du genre linceul de Turin, il ne pourrait s'agir que de copie, mais toute copie antérieure au XIVème serait à rechercher.
- L'importance des recherches à poursuivre. La science ne peut expliquer le linceul, notamment en se référant aux techniques de l'époque médiévale. Jusqu'ici, elle ne s'est pas encore penchée sérieusement sur le linceul. Beaucoup d'écrits en effet ont paru sur ce sujet, mais souvent en reproduisant des données insuffisamment vérifiées, et seuls une vingtaine d'articles dans le monde semblent pouvoir servir de documents de base. On ne saurait donc trop recommander la poursuite de recherches approfondies remontant à la source.



hibou ecrit Cette petite Emma est autiste mais a une voix merveilleuse

Un peu d'Histoire - Dates historiques


Principales dates relatives à l'étude du Linceul

probablement le 7 avril 30, peut-être le 3 avril 33CRUCIFIXION DE JÉSUS : "APRÈS L'AVOIR CRUCIFIÉ, LES SOLDATS PRIRENT SES VÊTEMENTS, ILS EN FIRENT QUATRE PARTS, UNE POUR CHAQUE SOLDAT, ET SA TUNIQUE. MAIS LA TUNIQUE ÉTAIT SANS COUTURE, TISSÉE D'UNE SEULE PIÈCE DEPUIS LE HAUT. ILS SE DIRENT DONC ENTRE EUX : 'NE LA DÉCHIRONS PAS, MAIS TIRONS AU SORT À QUI ELLE SERA."(JEAN, XIX, 23-24). APRÈS SA MORT, JÉSUS FUT MIS AU TOMBERAU DANS UN LINCEUL NEUF ACHETÉ PAR JOSEPH D'ARIMATHIE. LE JOUR DE PÂQUES, LES DISCIPLES EN ARRIVANT AU TOMBEAU, VIRENT "LES LINGES LÀ, AFFAISSÉS ; ET LE TISSU QUI ÉTAIT SUR SA TÊTE N'ÉTAIT PAS AFFAISSÉ AVEC LES AUTRES LINGES, MAIS ENROULÉ, LUI, EN PLACE" (JEAN, XX, 6-7)
~ 57MA'NU VI HÉRITE DU TRÔNE D'EDESSE ; RETOUR AU PAGANISME ET PERSÉCUTION DES CHRÉTIENS
~ 326HÉLÈNE, MÈRE DE L'EMPEREUR CONSTANTIN, (NÉE À TRÈVES EN 265 ET MORTE À NICOMÉDIE EN 327) SE REND EN PALESTINE POUR Y RETROUVER LES RELIQUES DE JÉSUS : ELLE Y AURAIT DÉCOUVERT NOTAMMENT LES CLOUS DE LA PASSION, LA CROIX ET UNE TUNIQUE DONT ELLE FIT DON À LA VILLE DE TRÈVES ; LE RÉCIT DE CE VOYAGE A ÉTÉ ÉCRIT PAR EUSÈBE DE CÉSARÉE (265 - 340) DANS SON HISTOIRE ECCLÉSIASTIQUE
330CONSTANTIN FONDE L'EMPIRE ROMAIN D'ORIENT ET CONSTANTINOPLE
476LES BARBARES PRENNENT ROME ; CONSTANTINOPLE RESTE CAPITALE DE L'EMPIRE ROMAIN
525Grande crue du Daisan, affluent de l'Euphrate, qui aurait inondé Edesse (cette crue est mentionnée dans les écrits de Procope de Césarée) ; au cours des travaux de reconstruction d'Edesse, on aurait découvert un linge portant l'effigie d'un homme caché au-dessus d'une des portes de la ville. L'empereur Justinien de Constantinople décide de construire la cathédrale Sainte Sophie à Edesse pour y conserver cette image
594Evagre le Scolastique écrit son Histoire ecclésiastique dans laquelle il fait mention de l'image d'Edesse comme "créée par Dieu, que des mains d'homme n'avaient pas produite" ; il situe sa découverte en 544
632 - 642INVASION DU MOYEN-ORIENT PAR LES ARABES. PRISE D'EDESSE EN 639 ; LES CHRÉTIENS SONT TOLÉRÉS ET LA CATHÉDRALE SAINTE SOPHIE EST PRÉSERVÉE AINSI QUE L'IMAGE D'EDESSE
673 - 677PREMIER SIÈGE DE CONSTANTINOPLE PAR LES ARABES
~ 692JUSTINIEN II FAIT BATTRE UNE MONNAIE À CONSTANTINOPLE À L'EFFIGIE DU CHRIST PANTOCRATOR
718DEUXIÈME SIÈGE DE CONSTANTINOPLE
723 - 842VIOLENCES DES ICONOCLASTES BYZANTINS ET MUSULMANS
~ 800L'IMPÉRATRICE DE CONSTANTINOPLE, IRÈNE, FAIT DON À CHARLEMAGNE DE LA TUNIQUE DU CHRIST ; CELUI-CI LA CONFIA À SA FILLE, THÉODRADE, RELIGIEUSE DE L'ABBAYE D'ARGENTEUIL ; ELLE SERA CACHÉE ET REDÉCOUVERTE EN 1156
943 - 944SIÈGE D'EDESSE PAR L'EMPEREUR DE BYZANCE ; L'IMAGE D'EDESSE EST ÉCHANGÉE CONTRE LA LEVÉE DU SIÈGE, LE PAIEMENT D'UNE FORTE SOMME ET LA LIBÉRATION DES PRISONNIERS MUSULMANS ; LE MANDYLION, NOM DONNÉ PAR LES BYZANTINS À L'IMAGE D'EDESSE, PART POUR SAMOSATE PUIS POUR CONSTANTINOPLE
964ARRIVÉE À CONSTANTINOPLE DU MANDYLION LE 156 AOÛT ; IL SERA CONSERVÉ DANS LA CHAPELLE DU PHAROS, DANS LE PALAIS DU BOUCOLÉON
1146LES TURCS S'EMPARENT D'EDESSE ; LA CATHÉDRALE SAINTE SOPHIE EST DÉTRUITE
~ 1150FABRICATION DU CODEX PRAY QUI CONTIENT PLUSIEURS MINIATURES REPRÉSENTANT LA PASSION DONT UNE REPRÉSENTE LES SAINTES FEMMES VENANT AU TOMBEAU APRÈS LA RÉSURRECTION ; ON Y VOIT UNE REPRÉSENTATION DU SUAIRE VIDE AVEC DES MARQUES CORRESPONDANT AUX TRACES DE BRÛLURES RELEVÉES SUR LE SUAIRE
1156DÉCOUVERTE, DANS L'ÉGLISE DU MONASTÈRE DES BÉNÉDICTINS D'ARGENTEUIL, D'UNE TUNIQUE TACHÉE DE SANG ; CETTE TUNIQUE CONNUE SOUS LE NOM DE SAINTE TUNIQUE D'ARGENTEUIL POURRAIT BIEN ÊTRE LA TUNIQUE SANS COUTURE QUE PORTAIT LE CHRIST PENDANT SA PASSION ET QUI FUT TIRÉE AU SORT PAR LES SOLDATS APRÈS LA CRUCIFIXION ; EN EFFET, LES TACHES DE SANG QU'ELLE PORTE ONT UNE DISPOSITION ASSEZ SEMBLABLE À CERTAINES DES TACHES APPARAISSANT SUR LE SUAIRE ET LE GROUPE SANGUIN DE CES TACHES EST LE MÊME QUE CELUI DU SUAIRE (A+, GROUPE DONT LA FRÉQUENCE N'EST QUE DE 7 % DANS LA POPULATION)
1196REDÉCOUVERTE, DANS LA CATHÉDRALE DE TRÈVES, DANS UN VIEUX CAVEAU, D'UNE TUNIQUE CONNUE COMME LA SAINTE TUNIQUE DE TRÈVES, QUI AURAIT ÉTÉ DONNÉE À CETTE VILLE EN 325 PAR SAINTE HÉLÈNE, MÈRE DE L'EMPEREUR CONSTANTIN ; IL S'AGIRAIT PEUT-ÊTRE DU VÊTEMENT EXTÉRIEUR DU CHRIST
1204PRISE ET SACCAGE DE CONSTANTINOPLE PAR LES FRANCS DE LA QUATRIÈME CROISADE, LE 12 AVRIL ; DISPARITION DU MANDYLION
~ 1205LE SAINT SUAIRE EST PROBABLEMENT À ATHÈNES
1248LA COURONNE D'ÉPINES EST TRANSFÉRÉE À LA SAINTE CHAPELLE QUE SAINT LOUIS VIENT DE FAIRE CONSTRUIRE POUR LA RECEVOIR
~ 1350PREMIÈRE OSTENSION DU SAINT SUAIRE À LIREY (CHAMPAGNE)
1353LE CHEVALIER GEOFFROY I DE CHARNY OBTIENT DU ROI JEAN LE BON UNE RENTE POUR FONDER L'ÉGLISE COLLÉGIALE DE LIREY
1354LE SAINT SUAIRE EST CONFIÉ À LA COLLÉGIALE DE LIREY
1353LE PAPE INNOCENT IV ACCORDE DES INDULGENCES AUX PÈLERINS DE LA COLLÉGIALE DE LIREY
1356BATAILLE DE POITIERS CONTRE LES ANGLAIS, LE 19 SEPTEMBRE ; MORT DE GEOFFROY I DE CHARNY SUR LE CHAMP DE BATAILLE ; SA VEUVE, JEANNE DE VERGY OBTIENT DU ROI QUE LES SUBVENTIONS SOIENT CONTINUÉES EN FAVEUR DE SON FILS GEOFFROY II DE CHARNY
1356L'ÉVÊQUE DE TROYES, HENRI DE POITIERS, ENVOIE UNE LETTRE DE FÉLICITATIONS À GEOFFROY DE CHARNY, LE 28 MAI
1357DOUZE ÉVÊQUES CRÉENT DES INDULGENCES EN FAVEUR DES PÈLERINS DE LIREY
1389GEOFFROY II DE CHARNY DEMANDE ET OBTIENT DU PAPE CLÉMENT VII L'AUTORISATION D'EXPOSER LE SUAIRE
1389RÉDACTION DU MÉMOIRE DE PIERRE D'ARCIS, ÉVÊQUE DE TROYES, PRÉTENDANT QUE LE SUAIRE DE LIREY EST UN FAUX (PEINTURE) ET DEMANDANT L'INTERDICTION DE SON EXPOSITION
1390LE PAPE D'AVIGNON, CLÉMENT VII IMPOSE SILENCE À PIERRE D'ARCIS SOUS PEINE D'EXCOMMUNICATION
1398MORT DE GEOFFROY II DE CHARNY, LE 22 MAI
1400LA FILLE DE GEOFFROY II DE CHARNY, MARGUERITE DE CHARNY, ÉPOUSE JEAN DE BEAUFREMONT ; CELUI-CI SE FERA TUER À AZINCOURT EN 1415 ; EN 1418, MARGUERITE DE CHARNY ÉPOUSERA EN SECONDES NOCES HUMBERT DE VILLERSEXEL, SEIGNEUR DE SAINT HIPPOLYTE SUR LE DOUBS
1418LE SUAIRE EST REMIS À HUMBERT DE VILLERSEXEL PAR LES CHANOINES DE LIREY ; IL SERA CONSERVÉ AU CHÂTEAU DE MONFORT, PRÈS DE MONTBARD, PUIS TRANSFÉRÉ À SAINT HIPPOLYTE SUR LE DOUBS, DANS LA CHAPELLE DES BUESSARTS
1438MORT DE HUMBERT DE VILLERSEXEL ; LES CHANOINES DE LIREY DÉSIRENT RÉCUPÉRER LE SUAIRE ; MARGUERITE DE CHARNY REFUSE ; L'AFFAIRE SERA PORTÉE DEVANT LE PARLEMENT DE DOLE (MAI 1443) PUIS LE TRIBUNAL DE BESANÇON (JUILLET 1447) QUI DONNERONT TOUS LES DEUX RAISON À MARGUERITE DE CHARNY. LES CHANOINES N'EN RESTERONT PAS LÀ ET DEMANDERONT L'EXCOMMUNICATION DE MARGUERITE DE CHARNY, À LAQUELLE ILS RENONCERONT MOYENNANT COMPENSATION FINANCIÈRE EN 1459 (CE QUI REPRÉSENTE QUAND MÊME 21 ANS DE QUERELLE !)
1449OSTENSION DU SAINT SUAIRE À CHIMAY (PRINCIPAUTÉ DE LIÈGE)
1452LE SUAIRE EST EXPOSÉ AU CHÂTEAU DE GERMOLLES (PRÈS DE MÂCON)
1453LE SAINT SUAIRE EST CÉDÉ AU DUC LOUIS DE SAVOIE PAR MARGUERITE DE CHARNY ET ARRIVE À CHAMBÉRY
1494LE SUAIRE EST EXPOSÉ À VERCELLI POUR LE JOUR DU VENDREDI-SAINT
1503GRANDE OSTENSION DE BOURG-EN-BRESSE
1506SAINTE CHAPELLE DU SAINT SUAIRE À CHAMBÉRY ET INSTITUTION DE LA FÊTE LITURGIQUE DU LINCEUL LE 4 MAI PAR LE PAPE JULES II
1509MARGUERITE D'AUTRICHE FAIT DON AU SUAIRE D'UN NOUVEAU RELIQUAIRE EN ARGENT
1516FRANÇOIS I VIENT À CHAMBÉRY LE 15 JUIN 1516 POUR VÉNÉRER LE SUAIRE APRÈS LA VICTOIRE DE MARIGNAN (1515)
1532INCENDIE DE LA SAINTE CHAPELLE DE CHAMBÉRY DANS LA NUIT DU 3 AU 4 DÉCEMBRE ; LE SAINT SUAIRE EST ENDOMMAGÉ PAR LE FEU ET PAR L'EAU QUI SERT À ÉTEINDRE L'INCENDIE
1534AUTHENTIFICATION DU SAINT SUAIRE APRÈS RESTAURATION PAR LES CLARISSES DE CHAMBÉRY
1535GUERRE DE CHARLES QUINT CONTRE FRANÇOIS I QUI ENVAHIT LA SAVOIE ; LE SAINT SUAIRE EST TRANSFÉRÉ À VERCELLI (PIÉMONT), ET EXPOSÉ À TURIN LE 4 MAI
1536LE SUAIRE EST EXPOSÉ À MILAN
1537LE SUAIRE EST EXPOSÉ À NICE OÙ IL RESTE JUSQU'EN 1543
1549LE SUAIRE EST CONSERVÉ DANS LE TRÉSOR DE LA CATHÉDRALE SAINT EUSÈBE À VERCELLI
1553LES TROUPES FRANÇAISES METTENT À SAC VERCELLI LE 18 NOVEMBRE ; LE SUAIRE EST SAUVÉ PAR UN CHANOINE QUI LE CACHE DANS SA MAISON
1561BREF SÉJOUR DU SAINT SUAIRE À ANNECY PUIS RETOUR À LA SAINTE CHAPELLE DE CHAMBÉRY
1578ARRIVÉE DÉFINITIVE DU SAINT SUAIRE À TURIN LE 14 SEPTEMBRE ; IL SERA VÉNÉRÉ, ENTRE AUTRES, PAR SAINT CHARLES BORROMÉE (1578), SAINT FRANÇOIS DE SALES (1613), SAINTE JEANNE DE CHANTAL (1639), PIE VII (1804), ETC.
1670LA CONGRÉGATION DES INDULGENCES ACCORDE UNE INDULGENCE PLÉNIÈRE AUX VISITEURS DU SUAIRE "POUR LA MÉDITATION DE LA PASSION, EN PARTICULIER DE LA MORT ET DE L'ENSEVELISSEMENT DU CHRIST"
1694LE SAINT SUAIRE ENTRE DANS LA CHAPELLE ROYALE DE LA CATHÉDRALE DE TURIN (1 JUIN), DANS LE SANCTUAIRE CONÇU SPÉCIALEMENT PAR GUARINO GUARINI, OÙ IL SE TROUVE TOUJOURS ; IL EST FIXÉ SUR UNE DOUBLURE NOIRE NEUVE CONFECTIONNÉE PAR LE BIENHEUREUX SÉBASTIEN VALFRÉ QUI AJOUTE ÉGALEMENT QUELQUES RAPIÉÇAGES LÀ OÙ LES RÉPARATIONS DES CLARISSES SONT INSUFFISANTES
1868LA PRINCESSE CLOTILDE DE SAVOIE COUD UNE NOUVELLE DOUBLURE DE SOIE ROUGE À L'ENVERS DU SUAIRE
1898PREMIÈRE PHOTO DU SAINT SUAIRE PAR SECUNDO PIA ET DÉCOUVERTE QU'IL S'AGIT D'UN NÉGATIF PHOTOGRAPHIQUE
1902PUBLICATION DE LA PREMIÈRE ÉTUDE SCIENTIFIQUE : "LE LINCEUL DU CHRIST" PAR PAUL VIGNON ; LE PROFESSEUR D'ANATOMIE COMPARÉE À LA SORBONNE, YVES DELAGE, AGNOSTIQUE, CONCLUE À L'AUTHENTICITÉ DU LINCEUL
1931LE PHOTOGRAPHE GIUSEPPE ENRIE PREND DE NOUVELLES PHOTOGRAPHIES DU SUAIRE, D'UNE QUALITÉ EXCELLENTE
1935PUBLICATION, PAR LE DOCTEUR PIERRE BARBET DES "CINQ PLAIES DU CHRIST", PUIS, EN 1949, DE "LA PASSION SELON LE CHIRURGIEN"
1969UNE COMMISSION DE SCIENTIFIQUES EST AUTORISÉE À EXAMINER LE SUAIRE ; DE NOUVELLES PHOTOS SONT PRISES PAR GIOVANNI-BATTISTA JUDICA-CORDIGLIA, CETTE FOIS EN COULEURS ET SOUS ÉCLAIRAGE PAR LAMPE DE WOOD
1972TENTATIVE D'INCENDIE CRIMINEL LE 1 OCTOBRE ; LE SUAIRE EST ÉPARGNÉ
1973PRÉLÈVEMENT D'ÉCHANTILLONS PAR MAX FREI EN VUE D'UNE ÉTUDE SUR LES POLLENS ET PAR D'AUTRES SCIENTIFIQUES POUR ÉTUDE SUR LES TACHES DE SANG
1978ETUDES SCIENTIFIQUES PAR LE STURP
1983LE SAINT SUAIRE EST LÉGUÉ AU PAPE PAR LA FAMILLE ROYALE DE SAVOIE
1988DATATION AU CARBONE 14 QUI CONCLUT À UN FAUX CRÉÉ ENTRE 1260 ET 1390.
1989SYMPOSIUM SCIENTIFIQUE DE PARIS ET CRÉATION DU CIELT ; MISE EN ÉVIDENCE DE FAUTES GROSSIÈRES DANS LA DATATION AU CARBONE 14
1993SYMPOSIUM SCIENTIFIQUE DE ROME ; CONFIRMATION PAR LA COMMUNAUTÉ SCIENTIFIQUE DE SON AUTHENTICITÉ
1997INCENDIE CRIMINEL DE LA CHAPELLE ROYALE DE TURIN ; LE SUAIRE ÉCHAPPE "MIRACULEUSEMENT" À LA DESTRUCTION
1997SYMPOSIUM SCIENTIFIQUE DE NICE : CONFIRMATION QUE LE LINCEUL DE TURIN N'EST PAS UNE RÉALISATION HUMAINE








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Contre - Calvin contree la sindonologie


L’argumentation de Jean Calvin contre la sindonologie

par Élie Nicolas - SPS n° 271, mars 2006
Sindonologie : Nom donné à une « discipline » censée étudier le suaire (et uniquement lui).
Il y a quelques mois la chaîne câblée KTO, confessionnelle et catholique, a montré un documentaire très favorable au suaire de Turin sans présenter aucune opinion contraire. Seuls les membres du CIELT1 ont eu droit à la parole et à l’image. Il faut bien admettre, après l’analyse au C14 et les études historico-critiques de Paul-Éric Blanrue2 précédemment engagées par Henri Broch3, que tout cela n’a pas convaincu les croyants, essentiellement catholiques d’ailleurs, les protestants semblant relativement imperméables aux vertus des reliques. La bibliographie sur le sujet est extrêmement abondante4, cependant les ouvrages sérieux sur le sujet sont, finalement, assez peu nombreux. L’histoire chronologique mettant en cause l’authenticité du suaire a fait l’objet de publications déjà fort anciennes puisqu’on trouve une publication la relatant dès 1821 sous la plume de Jacques-Auguste-Simon Collin de Plancy dans un ouvrage en trois volumes intitulé Dictionnaire critique des reliques et des images miraculeuses, dans les pages 100 à 1025. Cependant les pages 99 à 106 sont consacrées aux suaires que l’on trouve ici et là en Europe.
Des arguments d’ordre historique et théologique
Comme le dit l’article, la bibliographie sur le « suaire » est surabondante. Dans nos colonnes, le texte le plus récent est celui de la rubrique « Sornettes » du n° 262, qui est consacrée aux efforts désespérés des partisans de l’authenticité pour tenter de nier les résultats de la datation au Carbone14. Le texte que nous publions ici apporte des arguments d’ordre historique et théologique qui peuvent renouveler en partie le débat en des termes peut-être plus accessibles aux non-physiciens. Tout semble indiquer que le combat acharné d’une fraction des catholiques en faveur de l’authenticité est lié à des tensions internes à l’Église, où s’opposent modernistes et traditionalistes ; la référence à Calvin ne convaincra guère ces derniers, mais peut contribuer à éclairer les croyants de bonne foi.

Un détracteur aux sources de la foi

La foi ne se nourrit manifestement pas de preuves. Il m’est apparu comme évident d’aller m’alimenter aux sources de la foi, puisque c’est la foi qui fonde les prétentions des pro-sindonologues et de voir si le Nouveau testament permet de confirmer les allégations des tenants de l’authenticité du suaire de Turin. En prenant un des meilleurs guides qui soit, le juriste et théologien réformateur Jean Calvin. Celui-ci a écrit de très nombreux traités théologiques, mais il y a, au moins, deux ouvrages que tous les scientifiques zététiciens ou non devraient posséder : Advertissement contre l’Astrologie judiciaire6 dans lequel Calvin critique férocement l’astrologie divinatoire (c’est-à-dire judiciaire) et le Traité des reliques7 qui nous intéresse au premier chef, et qui a été écrit en 1543. Dans ces deux ouvrages, Calvin ne fait, évidemment, pas une critique « scientifique » des sujets traités. Il y fait une analyse rationnelle suivant une logique théologique de l’impossibilité de l’existence d’un art divinatoire fondé sur l’interprétation de la position des étoiles. L’intérêt de s’adresser à Calvin est multiple. D’une part, c’est un croyant dont personne ne peut mettre la foi en doute. C’est également un redoutable logicien (au sens de son époque bien évidemment), mais, en plus, son étude se place à un moment de l’histoire du suaire où celui-ci n’a pas encore été transporté à Turin8.

Les pérégrinations du suaire

Un court rappel historique de l’errance du suaire n’est, ici, pas inutile. En avril 1349, début de la construction de l’église Sainte-Marie de Lirey, dans laquelle sera entreposé, plus tard, pour ostentation, le suaire ; elle sera terminée en 1353. En 1370 l’évêque de Troyes interdit les ostentations en arguant que les évangiles ne font pas mention d’un suaire ; en 1390 l’oncle du pape Clément VII devient propriétaire du suaire par épousailles ; celui-ci, par sa bulle du 6 janvier 1390, autorisera la reprise officielle des ostentations du linceul. Le 6 juin 1483 il apparaît dans l’inventaire des reliques de la Sainte-Chapelle de Chambéry. Le 26 avril 1506 le pape Jules II signe une bulle qui autorise le culte public du linceul et précise même qu’il est reconnu comme « unique linceul dans lequel Notre-Seigneur Jésus-Christ lui-même fut enveloppé au tombeau  ». Dans la nuit du 3 au 4 décembre 1532 un incendie ravage le lieu où le linceul est entreposé et une partie de celui-ci est abîmée, il est alors restauré, et finalement le 16 septembre 1578 il est transporté à Turin où il se trouve encore9.
Calvin ne fait pas une étude historico-critique10 de la provenance du suaire, soit qu’il n’ait pas connaissance de cette histoire, soit qu’il considère le problème historique comme secondaire dans la mesure où il démontre logiquement et théologiquement l’impossibilité d’un tel objet. Il conjecture donc l’authenticité du suaire suivant trois axes : la profusion des suaires dément leur authenticité, les rites d’ensevelissement des juifs à cette époque infirme l’idée même d’un linceul couvrant entièrement le corps du crucifié et l’évangile ne donne rien qui puisse attester l’existence d’une telle relique, bien au contraire.

Premier argument de Calvin : la multiplicité des suaires

Le premier axe est une analyse « statistique », il fait le catalogue de tous les lieux qui prétendent détenir tout ou partie d’un linceul/suaire « absolument authentique ». Il cite les villes de Nice, Aix-la-Chapelle, Le Trect11, Besançon, Cadouin en Limousin12, une ville de Lorraine située au Pont d’Aussois et même des morceaux épars qui se trouvent à San Salvador en Espagne et aux augustins d’Albi. À la suite de ce catalogue, il déclare de façon fort logique :« Car quiconque estime le suaire être en un certain lieu, il fait faussaires tous les autres qui se vantent de l’avoir. » Outre le catalogue des suaires existants en Europe, il met également en cause des suaires dont plus personne ne parle aujourd’hui comme le suaire que la Vierge Marie aurait mis sur les parties honteuses de Jésus et qui est exposé à Saint-Jean de Latran, mais on en montre un autre dans l’église des augustins à Carcassonne ; le suaire de « la Véronique », quant à lui, est exposé à Saint Pierre de Rome13. Pour être complètement exhaustif sur le sujet des « suaires » miraculeux, il faut parler ici du Mandylion. Il ne s’agit pas à proprement parler d’un suaire, mais du portrait de Jésus. Connu d’après de nombreuses textes en langue syriaque, rédigés entre le IVe et le IXe siècle, qui racontent qu’Hannan (ou Ananias) peintre officiel du roi d’Edesse Abgar V Ukama, peignit le portrait du Christ sur un linge de coton blanc dont ce dernier venait de se servir pour essuyer la sueur de son visage.

Second argument : le rite funéraire juif

Le second axe de contestation de Calvin se situe sur le plan ethnographique. Il reprend le témoignage de saint Jean14 qui affirme que Jésus fut enseveli à la façon des Juifs. Calvin précise que la façon dont les Juifs ensevelissent leurs défunts est encore pratiquée de la même manière qu’en son temps : « les Juifs observent encore aujourd’hui ». De même que l’étude de « leurs livres qui montrent l’usage ancien » atteste la permanence des rites de funérailles des israélites. Les Juifs dans leurs rites funéraires enveloppent à part le corps jusqu’aux épaules, puis enveloppent la tête dans un « couvre-chef le liant à quatre coins » alors que tous ceux qui prétendent avoir le suaire montrent un grand linceul qui couvrait tout le corps. Il est sûr de son fait, citant à nouveau saint Jean15 qui rapporte le témoignage de saint Pierre qui vit les linges du linceul d’un côté du tombeau et le suaire de l’autre. De même, Calvin fait une digression étymologique expliquant la signification du mot suaire, il faut l’entendre comme « un mouchoir ou couvre-chef et non pas pour un grand linceul qui serve à envelopper le corps ». Et de conclure que soit saint Jean est un menteur, soit « tous ceux qui se vantent d’avoir le vrai suaire sont convaincus de fausseté ».

Troisième argument : l’absence du suaire dans les Écritures

Le troisième axe d’appréhension de Calvin concerne les textes qui fondent la foi. Les arguments qu’il développe le plus sont, bien évidemment, ceux qui touchent aux aspects scripturaires. Reprenant les écritures, Calvin s’étonne, avec ironie, que les évangélistes, si prompts à faire la relation des miracles accomplis par Jésus qui n’ont rien laissé de tangible à l’histoire, ne disent rien d’un tel miracle. Un autre événement provoque l’étonnement de notre auteur : il concerne le fait qu’aucun des auteurs du Nouveau Testament ne fasse mention de disciples ou de femmes présentes lors de la visite du tombeau qui auraient emporté au dehors les linges signalés par saint Pierre. Or le sépulcre était gardé par des « gendarmes » qui avaient le linceul à leur disposition. Il est permis de supposer qu’ils auraient pu le vendre à de zélés disciples de Jésus pour, justement, en faire des reliques. D’autant que les pharisiens, en les poussant au faux témoignage du vol du corps par les disciples pendant la nuit16, auraient pu facilement susciter la vénalité de ces gardiens peu scrupuleux. De même, lorsqu’un suaire brûle « il s’en est toujours trouvé un nouveau le lendemain » pour lequel on affirmait que c’était le même que celui de la veille, qu’un miracle aurait sauvé du feu et que « la peinture était si fraîche que le mentir n’y valait rien17 ».

Une démonstration plus convaincante pour les croyants ?

Comme on vient de le voir en suivant les démonstrations de Calvin, si la science laisse les croyants incrédules devant les preuves de l’inauthenticité des linceuls du Christ en général et du suaire de Turin en particulier, la simple lecture des évangiles et l’application de la logique la plus élémentaire permet de conclure à l’inconsistance de la thèse soutenue par les prosindonologues. Ce qui était vrai pour Calvin au milieu du XVIe siècle n’a, pour l’instant, pas été infirmé par la découverte de textes pré-ou post-bibliques ni même de nouveaux manuscrits des récits évangéliques.
Destiné aux croyants, cet argumentaire présenté par Calvin n’est pas inintéressant non plus pour les non-croyants. Un avis pertinent venu de l’intérieur même de la religion ne peut qu’être un soutien supplémentaire à la manifestation de la vérité.
1 Centre International d’Etudes sur le Linceul de Turin. http://perso.wanadoo.fr/cielt/.
2 Paul-Eric Blanrue, Miracle ou imposture ? L’histoire interdite du « suaire » de Turin, Golias, 1999, et L’histoire dans tous ses états, Book-e-book, 2003, p. 144-157.
3 Henri Broch, Le paranormal, éditions du Seuil, 1985, et Au cœur de l’extra-ordinaire, Book-e-book, 2002 (2e éd.), p. 318-320.
4 Paul-Eric Blanrue, op. cit., p. 272.
5 Jacques-Auguste-Simon Collin de Plancy, Dictionnaire critique des reliques et des images miraculeuses, Paris, 1821 ; voir : http://gallica.bnf.fr/Catalogue/noticesInd/FRBNF30258510.htm#listeUC.
6 Jean Calvin, Advertissement contre l’Astrologie judiciaire, édition critique par Olivier Millet, Genève, Droz, 1985.
7 Jean Calvin, Traité des reliques, texte présenté par Irena Backus, Genève, Grands Textes, Labor et Fides, 2000. On trouve également ce traité inséré dans l’ouvrage de J.-A.-S. Collin de Plancy (voir note 5) dans le volume trois, aux pages 255 à 334 du fichier au format pdf.
8 Op. cit. p. 38-42
9 Pour une histoire détaillée, de même qu’une analyse de l’état du dossier voir : http://www.ldi5.com/sindo.php
10 Au XVIe siècle cette technique d’étude des faits historiques n’a pas encore été élaborée ou plutôt ne s’est pas encore généralisée. Même si l’on peut légitimement considérer que la critique de la donation de Constantin faite par Lorenzo Vala et publiée en 1442 fonde la méthode historico-critique.
11 Probablement Trèves.
12 Le suaire de Cadouin vaut, à lui seul, le détour, voir : http://www.best-of-perigord.tm.fr/s...http://perso.wanadoo.fr/vent.ouest/...
13 Il faut bien évidemment comprendre dans mon propos que les suaires en question sont exposés au moment où Calvin écrit.
14 Jean 19, 40 : « Ils prirent donc le corps de Jésus, et l’enveloppèrent de bandes, avec les aromates, comme c’est la coutume d’ensevelir chez les Juifs. »
15 Jean 20, 6-7 : 6 « - Simon Pierre, qui le suivait, arriva et entra dans le sépulcre ; il vit les bandes qui étaient à terre, 7 - et le linge qu’on avait mis sur la tête de Jésus, non pas avec les bandes, mais plié dans un lieu à part. »
16 Matthieu 28, 13 : « en disant : Dites : Ses disciples sont venus de nuit le dérober, pendant que nous dormions. »
17 Il est probable qu’il s’agisse là d’une allusion à l’incendie de décembre 1532.

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